La Maison des Épines, de Rozenn Illiano (2023)

La maison des épines (couverture)La Maison des Épines, le dernier-né de Rozenn Illiano, nous propulse dans l’univers mystérieux des marcheurs de rêves, nous faisant retrouver un personnage fugitivement croisé dans Érèbe : le mime Sonho.

La Maison des Épines propose une tragédie sublime, une histoire captivante de mystères, de malédiction et de responsabilités familiales, une intrigue entre présent et passé parfaitement construite, pendant – in-dé-pen-dant ! – d’Érèbe.

Rien à redire sur la construction, la narration est menée d’une main de maître. Rozenn Illiano, au fil de son œuvre, virevolte entre les genres et les ambiances et nous propose ici un roman gothique, entre, comme il se doit, l’Angleterre de l’époque victorienne et un vieux manoir rempli de secrets pour le décor ; elle s’approprie les codes, les mixe avec ceux de son univers et lie le tout avec une écriture fluide et travaillée qui rappellera la poésie ciselée d’Érèbe ou de Midnight City.

C’est aussi un ballet de nombreux personnages et, même si leurs interactions et leurs liens sont parfaitement retranscrits, je reconnais que, à ce niveau-là, certains, certaines, ne me laisseront pas un souvenir aussi fort que d’autres (indice : je peine déjà à me rappeler certains prénoms), que ce soit la faute à leur caractérisation, à leur rôle dans l’histoire ou à une occultation par le charisme d’autres personnages. À l’inverse, d’autres ont été des rencontres foudroyantes, de ses personnages qui s’impriment sur la rétine à travers les mots, à l’instar de Sonho, Augusta ou Ariane, mais aussi de Reine, personnage mutique mais absolument magnétique.
D’ailleurs, la force visuelle du récit ne concerne pas uniquement les personnages : Rozenn Illiano pose des scènes, des lieux, des objets avec une plume qui stimule l’imagination. Quelques mots évocateurs et précis suffisent parfois à donner vie au récit et à faire naître la fascination, face à certains numéros du  cirque Beaumont, le manoir avec sa cave, son cimetière et ses prunelliers – motif récurrent dans son œuvre car manifestations physiques du rêve –, certains épisodes finaux…

Ainsi, plus que son intrigue et ses rebondissements, c’est un roman qui me marquera avant tout pour son atmosphère onirique, emplie de beauté et de tristesse entremêlées. Il y a l’émerveillement face aux superbes numéros des circassiens qui semblent aller au-delà de ce qu’il est possible d’accomplir en vrai, et il y a le deuil, la douleur de la perte, la nostalgie, les regrets qui imprègnent les mots et le cœur d’une marée insidieuse, puis s’y joignent la peur, la menace d’un danger impalpable…
Sans parler du mythe du Minotaure, avec son labyrinthe, Ariane et ses fils, ses jeunes gens sacrifiés, qui apparaît en filigrane tout au long du récit, j’y ai trouvé des échos à d’autres œuvres (dont certaines chères à l’autrice). Le Cirque des rêves, évidemment, avec ce cirque entre rêve et réalité, ses représentations exceptionnelles, cette plongée dans une ambiance unique au cirque sitôt le portail franchi… La série Dark dont j’ai retrouvé l’ambiance sombre, les boyaux souterrains et l’idée des voyages dans le temps avec les conséquences possibles sur le présent. Mais aussi Shining : la maison (ou ce qu’elle cache) influençant ses habitants, amplifiant leurs émotions, exacerbant leurs traits de caractère, les scènes du passé et l’inconnu derrière chaque porte, un homme braillant et arpentant les couloirs d’un pas furieux comme Torrance à travers l’Overlook…

Une excellente lecture portée par un univers puissant, aussi doux et poétique qu’empreint de désespoir ; une histoire envoûtante que ce soit quand elle prend le temps de poser son cadre, ses protagonistes, de laisser grandir ses mystères, ou quand elle se déploie dans une seconde partie beaucoup plus effrénée.

« Il neige, alors. Quelques rares flocons descendent du ciel, doux et légers, tombant sans bruit, et d’où il se trouve, à l’écart avec les spectateurs, il voit les paupières d’Ariane frémir, comme éveillée par ces monceaux de nuage qui virevoltent devant elle.
Elle redresse la tête – lentement, si lentement… –, ses mains quittent les plis de la jupe, ses doigts se détachent peu à peu du tissu, ses bras s’élèvent dans un long mouvement rouillé, le retour à la vie du marbre endormi, le rêve de pierre prenant forme dans la réalité.
Ariane lève les bras, les mains en coupe ; la neige tombe plus fort. La jeune femme recueille les flocons dans ses paumes, languissante, puis elle les porte à son cœur comme s’il s’agissait du plus beau trésor que ce monde ait à offrir, bougeant imperceptiblement, sans se hâter, le temps ralenti. Ensuite, elle incline la tête de nouveau et ferme les paupières, et se rendort, pour une heure ou pour un siècle. »

« Dehors, les ténèbres s’abattent sur le domaine, comme une lame de fond. La forêt disparaît, le ciel avec lui, et l’éclat de la lune, mangés par des créatures dont ils ne distinguent rien au début, jusqu’à ce qu’elles s’approchent de la maison, l’assaillent, l’entourent.
Des branches par milliers, gigantesques, au bois d’un noir profond. Des épines de la taille d’une lame, qui s’enfoncent dans les murs et menacent de briser les fenêtres, de s’engouffrer dans la bâtisse. Le toit gémit ; le sol gronde encore, puis le silence se fait. À l’extérieur, une armée de rêves les empêche de sortir.
Les prunelliers se sont réveillés. »

« Voilà le pouvoir du rêve, en réalité. Plus que montrer la douleur, il montre le remords, la brûlure que l’on chérit à se demander ce que le monde serait si.
Si tu avais emprunté cet autre chemin, Sonho, que serais-tu devenu ? »

La Maison des Épines, Rozenn Illiano. OniroProds (auto-édition), 2023. 428 pages.

Onirophrénie, de Rozenn Illiano (2018)

Onirophrénie (couverture)Non, vous ne rêvez pas, c’est encore un roman de Rozenn Illiano qui doit indubitablement faire partie des auteurs et autrices les plus chroniqué·es sur ce blog. Récemment, j’avais pointé du doigt les défauts de la saga Town qui n’avait donc pas su me convaincre pleinement. Or, cette fois, j’ai adoré ma lecture, Onirophrénie rejoignant tout de go mes romans favoris de cette autrice.

Onirophrénie nous replonge dans l’Apocalypse, dans la peau de Lili, une marcheuse de rêves rencontrée dans d’autres nouvelles (dans 18.01.2016, « La Boîte noire »…). C’est l’histoire de son périple accompagné du jeune Fañch, leurs questionnements, leurs errances, leur amitié, leurs angoisses face à cette fin annoncée.

Ce roman évite tous les écueils de deux premiers tomes de Town, sachant qu’Onirophrénie et Tueurs d’anges se déroulent en parallèle. C’est-à-dire que, cette fois, j’ai ressenti les choses, j’ai vraiment été en empathie avec les personnages principaux. Je me suis attachée à Lili et à Fañch, j’ai été attendrie par leur duo, attristée au moment d’un choix douloureux. J’ai craint les mauvaises rencontres sur ces routes poussiéreuses et savouré avec eux les jours dans des havres de paix. Évidemment, la suite est connue pour qui a lu Town, mais cela ne nuit en rien à ce roman prenant.
Cependant, n’attendez pas un livre de post-apo mené tambour battant du début à la fin. Les anges ou les néphilistes (les fanatiques qui les soutiennent) ne seront donc pas présents à chaque détour de rue, loin de là : pour les retrouver, il faut plutôt se tourner vers Town. Le rythme est parfois lent, l’intériorité et le cheminement des personnages sont au cœur du récit et les personnages souvent paumés face à ces cartes rebattues suite à la destruction de leur monde. Ce sont des personnages lambda (en dépit des pouvoirs de Lili), faillibles, qui se soutiennent l’un l’autre, et non des héros sans peurs ni doutes.

Et puis, il y a tout le reste. Les spécificités de l’histoire de Lili. Des éléments qui étaient tout à fait ma came, peut-être parce que des bribes m’ont touchée, m’ont parlé. Lili est une marcheuse de rêves puissante mais au pouvoir déglingué par des peines anciennes, des fêlures non réparées. D’où des rêves mutilés et douloureux. À l’heure où, peut-être, plus rien n’est grave, à l’heure où, peut-être, plus rien ne compte, son cheminement sera aussi bien géographique que psychologique et l’absence d’avenir va la pousser à regarder vers son passé.
Une amitié qui a mal tourné. La peur de retourner vers l’autre, l’angoisse du rejet. Ces gens que l’on aimait tant et qui, pourtant, se sont éloignés – dont nous nous sommes éloigné·es –, sans trop savoir pourquoi, sans trop savoir comment.
Et du fait de l’Apocalypse à venir, des questionnements inévitables qui résonnent à merveille avec notre situation actuelle. Pourquoi, comment continuer, à quoi ça sert, notre petitesse et notre insignifiance face à des événements qui nous dépassent. Si ce n’est que notre fin ne viendra pas d’une puissance supérieure et d’êtres surnaturels…

Comme toujours avec Rozenn Illiano, Onirophrénie – quoique parfaitement indépendant – s’inscrit dans le Grand Projet et avoir pris le temps de lire Town avant reste une très bonne idée tant ces romans se complètent (au niveau de l’histoire, des personnages, etc.), s’éclairant ainsi mutuellement. Autant dire que, après ma lecture, je suis allée feuilleter Town pour relire certains passages avec de nouvelles informations. Il y a également des références au monde d’Atlacoaya, déjà évoqué dans des nouvelles (que je n’ai, pour ma part pas encore lues).
Et puis, il y a tous les clins d’œil que l’on repère lorsque l’on suit l’autrice. Des présences familières, des lieux, des films…
Ainsi, tout se répond et s’entrecroise et, comme toujours, cette idée m’enchante.

Des défauts ? J’avoue une pointe de déception face à une certaine situation qui se résout trop rapidement à mon goût. Les explications avancées dans le roman ne m’ont pas pleinement convaincue et les suites m’ont parues de bien faible conséquence. Sans être le cœur du récit, les anges et les humains terrifiants de l’Apocalypse sont tout de même présents dans le monde où évoluent Lili et Fañch et ils avaient un bon potentiel pour des instants d’angoisse pour les personnages, de suspense et de tension, en contrepoint à celles et ceux qui leur apportent un apaisement et des havres de paix. Disons les choses, j’aurais préféré que Lili ait un peu plus de mal à s’en dépatouiller, que l’obstacle soit un peu plus important, que l’équilibre adjuvants/opposants soit plus juste, bref, ne pas avoir tiqué sur un chouïa de facilité

Malgré un passage un peu sous-développé à mon goût, Onirophrénie est un très bon roman, sensible et poétique, qui m’a embarquée de la première à la dernière page à travers cette France en miettes à l’image du cœur de son héroïne.

« Il arrive que faire le deuil des vivants, parfois, soit plus difficile que faire le deuil des morts. Parce qu’ils sont là, à portée, parce qu’ils peuvent encore écouter, parler comprendre, mais aussi rejeter et refuser le dialogue.
C’est pour cela que c’est si difficile. Parce que tant qu’on n’essaie pas, tant qu’on ne cherche pas à reprendre contact et à dire ce que l’on a sur le cœur, leur réponse reste en suspens. On ne sait pas s’ils nous rejetteront ou s’ils nous accepteront, et cet entre-deux aveuglant s’avère bien plus facile et confortable que l’éventualité d’un abandon. »

« Nous ne sommes que des accidents qui ont grandi et qui se sont fabriqués une conscience, rien de plus. Mes mots et mes actes n’ont aucune importance, pas plus que ce que je suis. Le monde disparaîtra sans doute, balayé par les anges, et c’est tout. Un théâtre absurde et vain. »

« – C’est un éléphant ? demande Fañch.
Sa voix tremble un peu, d’émerveillement ou d’incrédulité. Il s’approche de la machine à grands pas puis s’arrête face à elle, stupéfait devant la beauté et la tristesse de ce spectacle.
Il avance sa main, touche le bois humide…
Une fée morte depuis trop longtemps. Un rêve éteint. Un vestige de ce que nous étions capables de créer de plus beau, un témoignage brisé par le ciel. L’éléphant tombé à terre, l’image terrible et magnifique de l’imaginaire, du merveilleux effacé. »

« Comment peut-on réellement décider de ce que l’on fera demain alors que tout peut basculer ? Alors que le monde est promis au néant à date fixe, nous empêchant d’appréhender notre si court futur ? Pour nos esprits effrayés, l’avenir ressemble à une impasse, un piège. On fonce dedans sans discernement, sachant très bien vers quoi nous allons et sans pouvoir faire demi-tour. Chaque heure, chaque jour qui passe est une heure, un jour en moins. Une blessure. Chaque battement de cœur est là pour nous le rappeler. Porteur de sa propre mort, un battement enfui, envolé pour toujours, jamais remplacé. »

Onirophrénie, Rozenn Illiano. Oniro Prods (auto-édition), 2018. 339 pages.

Érèbe, de Rozenn Illiano (2020)

Érèbe (couverture)Paris, 1888. Lisbeth St. John se sent piégée dans sa vie de fille de bonne famille. Sa seule échappatoire : ses rêves qui l’emmènent jusqu’à un monde mystérieux, Érèbe, son hiver perpétuel et son unique autre habitant, Elliot Valentine. Mais cet univers éthéré va se révéler lié avec la malédiction qui semble poursuivre sa famille et les conséquences sur la vie de la jeune fille seront quant à elle tout à fait réelles.

A l’occasion de sa sortie en numérique à petit prix, mardi prochain, Rozenn Illiano m’a proposé de découvrir cette histoire dans le superbe écrin de la version luxe (couverture rigide, jaquette veloutée et grand confort de lecture). J’en profite pour la remercier du fond du cœur.

Après ma lecture d’Elisabeta avec sa plongée quasi immédiate dans l’action et l’intrigue, j’ai tout d’abord dû m’habituer au rythme tranquille de ce récit. J’ai d’abord souhaité arriver plus vite au cœur du sujet avant de me fondre dans cette cadence plus tranquille, comme une balade sous la neige, une évasion poétique.
La tonalité est hivernale, la nuit est reine et le silence roi. Un tapis de neige, un château désert, un hululement discret, de vieilles demeures familiales, les échos d’un cirque… Une ambiance a priori paisible, évidemment troublée par des secrets de famille et des évènements dramatiques. Si l’histoire principale se déroule sur plusieurs mois, la chronologie s’étend en réalité sur plusieurs siècles, révélant l’avenir et le futur (probable mais non figé) des deux familles. Le drame s’est en effet noué des décennies plus tôt, semant son lot de tragédies et de souffrances.

Au récit est entremêlé des chapitres « Passé » et « Futur » qui nous montrent des instants, des bribes d’événements ponctuels qui s’éclaircissent au fil du roman. Peu à peu, nous comprenons qui est qui, l’identité de ces silhouettes, leurs interactions, leur insertion dans cette grande histoire familiale. J’avoue être particulièrement séduite par cette manière de dévoiler les choses progressivement, de connecter les personnes, les lieux et les péripéties, de rétablir la chronologie et la généalogie (sans se référer aux arbres généalogiques en fin de roman).

La rencontre de Lisbeth et Elliot s’inscrit donc dans une lignée de décès et d’amours malmenées. Même s’ils m’ont moins marquée que d’autres protagonistes (Oxyde, Saraï, Agathe…), les personnages sont très sympathiques et bien campés. Je craignais l’aspect romance, mais finalement, elle se fait toute douce et très discrète et n’a posé aucun problème. J’en venais même à espérer leur bonheur.
Rares sont les personnages manichéens et, même si j’aurais pu souhaiter davantage de faux-semblants et de retournements de situation, tous et toutes suivent leur ligne de conduite (même si elle n’est pas toujours très jolie), leurs objectifs, guidé·es par leurs rêves, leurs rancunes, leurs espoirs (parfois déçus). Il y a de la nuance, de la crédibilité et de la vie dans ces protagonistes, ce qui est le plus important. J’ai beaucoup aimé les relations père-fils ou mère-fils, tantôt mâtinées d’exigence ou de tendresse, de rudesse ou d’inquiétude, de connivence ou de secrets : ces échanges sont bien écrits et m’ont particulièrement convaincue.
Dans les personnages du passé, j’ai été fascinée par la figure de Victoria, sa majesté, ses choix et les épreuves qu’elle a dû affronter. J’aurais plaisir à la retrouver peut-être, à travers d’autres histoires.

Une histoire de rivalité entre deux familles, voilà qui n’est pas nouveau. La raison est un peu plus originale du fait de la situation presque chimérique du territoire revendiqué (un univers qui stimule l’imagination et fait rêver la solitaire que je suis !). Quoi qu’il en soit, l’autrice donne corps à cette haine qui s’étire sur des décennies, des siècles, au point que tous et toutes en ont oublié la source, écartant et dénigrant celles et ceux qui tentent de tendre la main vers l’autre côté, spirale infernale conduisant vers une issue sanglante.

Cette intrigue qui possède son lot de révélations et de surprise élargit encore une fois l’univers de Rozenn Illiano, nous faisant partir à la rencontre des énigmatiques marcheurs de rêves. Cependant, comme toujours (ou presque) dans son Grand Projet, le livre est parfaitement indépendant. A titre personnel, j’ai pris grand plaisir à chercher les indices, les croisements avec d’autres romans de l’autrice, mais c’est un jeu facultatif. (J’ai également été enchantée des références à un autre roman que j’aime beaucoup, Le Cirque des rêves, d’Erin Morgenstern.)

En dépit de quelques lenteurs dans la première moitié du roman, j’ai été charmée par cet univers onirique qui ferait presque penser à un conte. Une histoire de rivalités, de famille et de rencontre amoureuse joliment menée par la sensibilité atypique de Rozenn Illiano. Je reste éternellement enchantée par cet assemblage progressif des pièces du puzzle racontant l’histoire enlacée des St. John et des Valentine et fascinée par ce nouveau pan du Grand Projet.

« Érèbe n’est toujours qu’un rêve. Ce qui y naît aussi. Ce ne sont que des rêves dans des rêves, mais rien ne dit que ce n’est pas réel. »

« J’ai appris avec le temps que parler de l’avenir le provoque. Vouloir échapper à notre sort est le plus sûr moyen de s’y précipiter. »

Érèbe, Rozenn Illiano. Oniro Prods (auto-édition), 2020. 348 pages.

Plus d’informations sur le site de l’autrice.

Pour aller plus loin, vous pourrez trouver sur le blog Tasse de thé & Pile de livres un entretien avec Rozenn Illiano : il aborde cette réédition, ses personnages, son Grand Projet, etc.