Les gens normaux : paroles lesbiennes, gay, bi, trans, d’Hubert, dessins de Cyril Pedrosa, Audrey Spiry, Alexis Dormal, Jeromeuh… (2013)

Les gens normauxQu’est-ce que la normalité ? Existe-t-elle vraiment ? La société n’est pas normale, mais normée : elle classe, met des étiquettes, range dans des boîtes. Et ceux qui ne rentrent pas dans les bonnes boîtes en font les frais. Les gens normaux aborde la question du genre, de l’homosexualité et de la transidentité à travers dix témoignages recueillis à l’aide du centre LGBT de Touraine.

Ce livre est né dans une année tumultueuse pour les gays, les lesbiennes, les bi ou les trans. Car si 2013, c’est l’adoption du mariage pour tous et la Palme d’or de La vie d’Adèle, c’est aussi la haine des « Manif’ pour tous », les dangereux amalgames entre homosexualité et pédophilie, la prise de parole en public de l’Église dans des affaires de l’État, les tabassages de jeunes gays, la loi russe interdisant « la propagande homosexuelle »…

C’est un ouvrage assez complet qui parle du SIDA dans les années 1980 et de nos jours, de l’homoparentalité, de la transidentité, des opinions politiques et religieuses (comment être gay et soutenir des partis de droite ? comment conjuguer son homosexualité et sa foi en Dieu ?), des relations avec les parents (notamment avec la mère pour une fille), de l’homophobie dans des pays africains, mais aussi au travail. On découvre le parcours d’un homme ayant perdu son conjoint, d’une mère, d’une Guinéen qui a émigré en France, d’un chrétien et d’un musulman croyants, etc.

Le parti qui a été adopté est d’illustrer à la fois l’entretien (en mettant face à face Hubert et son interlocuteur en train d’échanger) et les témoignages. Les dessins sont réalistes, mais évoluent évidemment selon le trait des onze dessinateurs différents ayant contribué à ce livre. Cela lui confère une richesse et une diversité intéressantes qui m’ont permis de découvrir de nombreux artistes.

Entre les témoignages se glissent cinq textes de chercheurs, spécialistes, conférenciers, sociologues comme Eric Fassin ou Michelle Perrot qui traitent de l’homosexualité selon différentes approches : la législation française, le lesbianisme, l’homophobie religieuse, les normes de l’hétérosexualité et la transidentité. La préface est rédigée par Robert Badinter, l’ancien Garde des Sceaux qui a soutenu activement la dépénalisation de l’homosexualité en 1982 et la création du Pacs en 1999, et porte sur les discriminations et les violences subies par les LGBT. Enfin, une carte et une annexe présente le statut légal de l’homosexualité pays par pays.

C’est donc une bande dessinée extrêmement riche et documentée qui apporte plusieurs éclairages sur des sujets parfois complexes, que ce soit par le biais des histoires personnelles ou des textes théoriques parfois compliqués bien que passionnant.

A lire pour se défaire de tous préjugés.

« A cet égard, l’ouvrage réalisé par bd BOUM et Les Rendez-vous de l’Histoire témoigne de cette difficulté d’être reconnu et accepté comme homosexuel par tous, avec la simplicité et le respect qu’on doit à tout être humain dans une société libéré de ses préjugés et de ses pulsions à l’encontre de ceux que certains ressentent encore comme différents et donc comme menaçants. »

(Robert Badinter, ancien Garde des Sceaux, ancien président du Conseil constitutionnel)

« Il n’y a vraiment pas de modèle de vie contrairement à ce que l’on veut bien nous faire croire. »

Les gens normaux : paroles lesbiennes, gay, bi, trans, ouvrage collectif. Casterman et BD Boum, 2013. 229 pages.

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