La Société des Pépés à Adopter, d’Emilie Chazerand (2019)

La société des pépés à adopter (couverture)Sérieuse Odile Ramona Donatienne Isadora Dauphin (acronyme : S.O.R.D.I.D.) est ultra pourrie gâtée par ses parents. Licornes de compagnie, carrousel dans le hall, quatorze chambres personnalisées et… une tripotée de domestiques pour s’occuper d’elle en leurs – nombreuses – absences. Jusqu’au jour où elle découvre l’existence des grands-pères. A partir de ce moment-là, elle VEUT un grand-père. Heureusement que la Société des Pépés à Adopter est là pour venir en aide à ses parents.

Une nouvelle fois, après Le génie de la lampe de poche et Ma vie moisie, Dieu et moi, Shirley Banana, me voilà pour parler du dernier livre d’Emilie Chazerand paru dans la collection Pépix de Sarbacane (merci Babelio et l’éditeur !).

Sans surprise, on retrouve un peu les mêmes ingrédients que dans ses livres précédents, à savoir du cynisme, des comparaisons imagées toujours pertinentes, de l’ironie, un peu d’absurde, bref, de l’humour sous toutes ses formes. Un peu moins de trucs dégueu que dans les précédents, même si la description d’une vieille personne par la meilleure amie de Sérieuse, Jessifer : absolument hilarant et totalement repoussant, avec un chouïa de mauvaise foi… mais de vérité aussi parfois ! Certaines blagues ne seront peut-être pas comprises par les plus jeunes, mais petit·es et grand·es se régaleront. En ce qui me concerne, le titre m’amusait déjà et les parallèles avec la vraie SPA m’ont bien fait rire.
Et ça dépote, ce roman, on n’a pas le temps de s’ennuyer ! Sérieuse nous embarque par la main et ne nous lâche qu’une fois arrivée au bout de son histoire (je l’ai lu dans une journée, incapable de décrocher bien longtemps).

Cependant, j’ai préféré ce roman aux deux autres (je ne le compare pas à La fourmi rouge qui ne vise pas le même public) car je l’ai aussi trouvé extrêmement touchant aussi. Après deux histoires qui se passait dans des lieux collectifs – la colo et l’orphelinat –, nous voici dans un « coquet petit manoir qui ne paie pas de mine » un peu vide. Cette petite fille qui a tout comme on le lui fait remarquer, mais qui leur fait remarquer en retour qu’elle n’a personne pour lui montrer de l’affection, pour la défendre, pour jouer avec elle, pour faire des câlins. Bref, qu’elle a tout ce qui est matériel, mais que, pour ce qui est de la chaleur humaine et des moments ensemble, sa famille présente de grosses lacunes. Ça parle aussi de harcèlement scolaire – eh oui, il n’y a pas qu’à la maison que la petite Sérieuse est un peu isolée, son angiome sur la face ne l’aidant pas à franchir indemne la barrière de moqueries de ces charmants enfants – et c’est aussi très réussi (bien que secondaire).

Récapitulons, voulez-vous ? La Société des Pépés à Adopter, c’est :

  • une jolie histoire intergénérationnelle pleine de tendresse qui nous invite à regarder du côté des bons moments plutôt que des jouets et autres possessions matérielles ;
  • une héroïne un peu caractérielle, mais tellement drôle et parfois trop choue ;
  • du rythme, du divertissement, de l’humour, mais aussi des réflexions intelligentes et subtiles ;
  • des illustrations qui, comme toujours, collent parfaitement à l’ambiance.

Conclusion ? Une réussite !

« Je ne sais pas si ça fait ça à tout le monde, mais moi j’ai souvent l’impression que mes parents sont des gros nuls.
Plus que « souvent » en fait : tout le temps. Le soir, quand je suis toute seule dans ma salle de ciné personnelle, je me repasse la vidéo de leur mariage. C’était huit mois avant… moi, le tsunami qui a détruit leur petite plage d’amour paradisiaque.
Dans ce film, mes géniteurs ont l’air super classe. Mère porte une robe vaporeuse (50 % coton 50 % vapeur) et une pimpante couronne de fleurs, comme les Femen. Père, lui, arbore avec fierté un costume fuchsia et des lunettes de soleil arc-en-ciel. Il est gentiment ridicule. Ils sourient tous les deux comme des témoins de Jéhovah.
Je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils étaient beaux, non, mais ils étaient moins moches qu’aujourd’hui, ça, c’est sûr. En les regardant danser et rire et faire la chenille, je me dis que c’est impossible, ça ne peut pas être Tancrède et Philibertine Dauphin, mes gros nuls de parents !
Je les ai aimés drôlement fort à une époque, mais maintenant, plus du tout. »

« Et puis un beau matin, ils ont commencé à payer des gens pour effectuer leurs corvées à leur place. Genre sortir les poubelles, faire les courses, nettoyer les toilettes et m’aimer.
Ça me faisait bizarre, au début, d’être entourée d’étrangers…
… jusqu’au jour où je me suis aperçue que c’étaient mes parents, les étrangers. »

« Vois-tu, un grand-père a besoin de soins particuliers. Il faut le sortir régulièrement, jouer avec lui, le stimuler.
– Je suis très stimulante !
 »

La Société des Pépés à Adopter, Emilie Chazerand, illustré par Joëlle Dreidemy. Sarbacane, coll. Pépix, 2019. 205 pages.

14 réflexions au sujet de « La Société des Pépés à Adopter, d’Emilie Chazerand (2019) »

  1. NON MAIS EMILIE CHAZERAND FAUT ABSOLUMENT QUE JE LA LISE !
    Ca fait quelques temps qu’elle me tape dans l’oeil entre La fourmi rouge, Falala et La société des pépés à adopter, il faut ABSOLUMENT que j’essaye de découvrir cette autrice incontournable de la littérature jeunesse !
    Tout le monde à l’air unanime sur l’humour de ses livres donc je SAIS que je passerai un bon moment, reste plus qu’à se lancer 😀

    Merci pour ce joli article qui fait envie !

    • Je te conseille vraiment vraiment La fourmi rouge ! Les autres aussi évidemment, et particulièrement La société des pépés à adopter, mais ils sont destinés à un public un peu plus jeune, donc ma préférence va toujours à La fourmi rouge. J’ai failli m’offrir Falalala à Montreuil mais finalement non, mais j’ai quand même très très hâte de le lire !
      Ouille, ce n’est pas un risque accru de déception, ça, quand on se dit que c’est sûr que ça va nous plaire ? J’espère que tu rejoindras l’unanimité en tout cas. ^^
      Merci à toi et bonne future lecture !

      • La fourmi rouge est à ma bibliothèque je crois ! Autre objectif de 2020 : découvrir Emilie Chazerand et Clémentine Beauvais, deux autrices contempo qui me font vraiment de l’oeil !
        Falala j’aimerais bien me l’offrir mais peut être en poche parce qu’en terme de prix et de place, le poche c’est mieux quand même ! Tu le liras probablement avant moi, hate de voir tes réactions 🙂
        Je guette Falalala à ma bibli, j’aimerais tellement le lire avant noel… Je me vois mal lire un livre sur Noël en février quoi, la déprime x)
        Oui c’est sur que c’est un risque que j’accepte de prendre en m’auto-hypant toute seule mais je suis trop dans l’ambiance noel et ce livre me parait tellement parfait ! Si déception il y a, vous le saurez hihi
        Tout pareil 🙂

        • Pour Clémentine Beauvais, je suis un chouïa plus mitigée, je ne partage pas totalement l’admiration universelle qu’elle semble recevoir sur la blogo, mais Les petites reines est une pépite !
          Je doute de le lire avant toi. Si tu vises la lecture à Noël, c’est même sûr que tu le liras avant moi. En tout cas, je guetterai ton article !

          • Il faut absolument que je lise celui-ci, je suis une adepte de vélo donc évidemment, celui là me tape dans l’oeil! Et le synops est si drole! Je vais essayé de découvrir quelques uns de ses livres pour me faire mon propre avis sans croire les yeux fermer la majorité blogesque hihi
            C’est mort pour cette année, on lui dit à l’année prochaine (enfin perso, je me vois pas lire ça en juillet comme je t’avais dit aha)

  2. J’ai adoré ce roman aussi ! Un très bon moment de lecture 😀
    Je suis en train de lire son dernier à Émilie Chazerand d’ailleurs, Falalalala. Rien à voir avec les pépés, mais un excellent moment de lecture aussi 🙂

    • Il me fait vraiment de l’oeil, celui-là ! Il est dans la même veine que La Fourmi rouge ou pas du tout non plus ? Enfin, je suppose que l’on retrouve son humour au minimum, ça a l’air bien déjanté ! Bonne lecture !

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