La tombe des lucioles, de Nosaka Akiyuki (1967)

Je ne pensais pas participer au rendez-vous des « classiques, c’est fantastiques » ce mois-ci, m’y étant prise trop tard pour me procurer le titre auquel je songeais, jusqu’à ce que la chronique de Sacha me rappelle ce titre présent dans ma bibliothèque, lu il y a longtemps et que je souhaitais relire.

2024 01 Asie

La tombe des lucioles est une nouvelle – partiellement autobiographique – racontant les derniers mois d’un frère et une sœur, orphelins japonais en 1945 (je ne divulgâche rien, c’est dévoilé dès le début).

La tombe des luciolesLe quotidien terrible de ces enfants est rendu palpable par les longues phrases qui convoquent les sens, même si ce n’est pas de la manière la plus agréable qui soit. Les aliments moisis, les odeurs corporelles, la crasse, l’urine et la diarrhée, les poux, les asticots et la gale, les sirènes assourdissantes des alertes aériennes, la cohabitation avec la mort et avec les morts… la réalité de la guerre prend aux tripes, écœure autant qu’elle désespère. Et puis, il y a cette ouverture affreuse dans laquelle Seita meurt seul, dans une gare, un fait qui semble totalement banalisé, pour les vivants autour de lui, par le lieu et l’époque.

Signalons également la langue qui surprend par moment. Au milieu des phrases très « littéraires » surgissent des mots d’argot, de l’oralité. Comme pour convoquer un peu la voix de ces enfants, trop vite usés, rongés, dévorés par le conflit, les privations, l’injustice, l’avarice de certains proches, l’indifférence…

Je reconnais des qualités à ce récit. Pourtant, il m’a manqué un ingrédient essentiel : il ne m’a pas touchée autant qu’il aurait dû, autant que je l’aurais souhaité avec une telle histoire. Quel aspect du livre faut-il incriminer ? Peut-être est-il trop rapide, peut-être l’intériorité de Seita et de Setsuko n’est-elle pas assez développée, le récit restant assez factuel…

J’ai tenté de lire Les algues d’Amérique, la seconde nouvelle de ce livre dans lequel la femme du narrateur invite un couple d’Américains rencontré à Hawaï lors de vacances. Il parle des relations avec les États-Unis, avec la langue anglaise également, avant, pendant et après la guerre, mais je serai bien en peine de vous en titre car j’ai fini par sauter des passages puis des pages puis par totalement l’abandonner. J’ai été totalement imperméable au récit, à l’humour et à cette présentation ultra dense qui ne laisse la place à aucune pause.

Une lecture mitigée qui a déçu les attentes que j’en avais. Pas totalement déplaisante, ni intéressante, mais qui n’a pas su réellement me bouleverser.

La tombe des lucioles, suivi de Les algues d’Amérique, Nosaka Akiyuki. Editions Picquier poche, 2004 (1967 pour l’édition originale). Traduit du japonais par Patrick De Vos et Anne Gossot. 139 pages.

45 réflexions au sujet de « La tombe des lucioles, de Nosaka Akiyuki (1967) »

  1. Je ne connaissais pas du tout, mais malheureusement, je ne crois pas que ce soit pour moi, d’autant plus, à la lecture de ton avis mitigé…

  2. Je crois que le décalage entre l’écriture factuelle et l’horreur de ce que vivent ces enfants a au contraire été ce qui m’a bouleversée. Comme quoi, c’est vraiment une affaire de sensibilité. Mon édition était illustrée, ça a peut-être joué aussi. Dommage pour ce rdv classique raté !

  3. J’ai peur que ce soit trop dur pour moi mais le fait qu’il ne t’ait pas autant touchée que prévu paradoxalement me rassure, car ça lui donne un aspect moins difficile émotionnellement…

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  5. Tu t’attendais à ressentir l’émotion que fait ressentir le Ghibli mais comme bien souvent, Miyazaki s’inspire très TRES vaguement du bouquin pour en faire de l’or (c’est le cas du dernier… J’ai lu le livre dont il est adapté avant de voir l’adaptation et ca a vraiment pas grand rapport aha)

    Ca ne me tente pas particulièrement, je pense que le film m’a suffit ^^

    • Je me souviens vaguement de l’adaptation (qui n’est pas de Miyazaki par contre, mais d’Isao Takahata), donc je ne peux pas dire à quel point elle était fidèle, mais je pense que l’émotion était plus grande parce que la proximité avec les personnages était elle aussi plus importante (alors qu’il y a une certaine distance dans le récit).
      Le garçon et le héron (que je n’ai toujours pas vu) est tiré d’un livre ? Je ne savais pas !
      En tout cas, je ne recommande pas forcément, même si d’autres ont été plus touché·es que moi.

      (Au fait, si tu as l’occasion de passer sur Messenger à l’occasion pour qu’on discute du moment pour la LC… ^^)

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  8. Ahhh, mais j’ignorais complètement que c’était une nouvelle au départ ! On en apprend tous les jours, merci 🙂

    Dommage en revanche que tu n’aies pas été transportée, d’autant plus que le film lui est… pfiou. Je m’en souviens encore et j’ai dû le voir étant ado. Pour le coup, l’image semble toucher davantage que les mots pour cette histoire semi-autobiographique…

  9. Je ne voulais pas lire ta chronique avant d’avoir rédigé la mienne. Je comprends ton impression, j’ai pour ma part été plus convaincue que toi.

    Merci pour ta participation.

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  11. C’est de là que vient Le tombeau des lucioles ? J’avoue… j’ai vu le film il y a longtemps, d’ailleurs c’est un des premiers films japonais visionné avec Princesse Mononoké. J’avais trouvé ça trop triste. Et quand je l’ai revu… ça l’était toujours autant. Alors le lire 😬

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