Chez les Chevalier, la musique est une histoire de famille. Ses grands-parents xylophoniste et tromboniste et leurs douze enfants mélomanes (et éventuellement leur conjoint) avaient même fondé un orchestre. Mais celui-ci avait été dissous peu après la naissance de Lucien et la famille s’était dispersée.
Mais quand sa tante Micheline appelle à l’aide pour soigner sa fille Paulette, Lucien a une idée : reprendre les représentations ! Mais tout n’est pas si simple au sein de la famille…
Nouvelle création des éditions Margot, cet album brille comme toujours chez eux par sa grande taille, son attractivité et le soin dont il a été l’objet. Cette couverture rouge et ses rideaux écarlates par lesquels un petit garçon à l’air timide et étonné jette un œil ont attiré mon attention dans toutes les librairies où il était présenté.
Tout en esquissant les portraits des membres tous différents d’une même famille (avec tous ces faciès incroyablement variés et truculents), ce récit évoque les difficultés à revenir sur le passé, laisse deviner de vieilles rancunes, bref, rend parfaitement compte de la difficulté des relations qui sont le lot de bon nombre de familles. Mais c’est aussi une jolie histoire de persévérance et de courage. Face au défaitisme et à la fuite des adultes, Félicien sauve l’orchestre (d’une certaine manière), le concert et, par la même occasion, sa cousine Paulette. A lui tout seul, il fait ce que les adultes ont trop peur de faire.
Les illustrations sont magnifiques. Un peu désuètes, douces, toutes en rondeur… De plus, Etienne Friess introduit dans son monde des machines abracadabrantes, des plaques de tôle, des boulons. Une chouette touche steampunk dans un univers quotidien et plutôt banal !
La mise en page est vraiment variée : une grande illustration sur une page, un bandeau qui utilise la largeur des deux pages, le texte au-dessus ou au-dessous, des petits dessins par-ci, par-là… jusqu’à la géniale double page finale. Une seule critique (souvent faite à cet album à ce que j’ai pu voir) : le texte est écrit en tout petit. Pas de problème pour moi, mais pour un enfant, ça ne facilite peut-être pas la lecture.
Un merveilleux album, superbement illustré, qui met sur le devant de la scène la famille et la musique. On sort de cette lecture en rêvant de pratiquer un instrument de musique !
Avec en prime, un très joli poster qui donne envie de se rendre illico presto à ce drôle de concert !
A tout hasard, ce corbeau à l’air fort rigide que l’on voit au début de l’album ne serait-il pas un clin d’œil aux oiseaux de bric et de broc dessinés par Etienne Friess dans Ici reposent tous les oiseaux ? C’est en tout cas ce qu’il m’a immédiatement évoqué.
« La famille Chevalier était une grande famille de musiciens Tout avait commencé avec grand-mère Huguette et son xylophone. A six ans, elle savait déjà faire danser les baguettes sur les lames en acier avec virtuosité. Lucien, son « homme », avait été un tromboniste émérite. Un soir, à la nuit tombée, il lui avait joué un menuet sous sa fenêtre. Huguette était immédiatement tombée sous son charme et toute sa vie était restée accrochée à lui comme une clé à sa portée. »
Félicien et son orchestre, Sébastien Pérez (textes) et Etienne Friess (illustrations). Editions Margot, 2015. 40 pages.