Voici trois albums qui se déroulent au bord ou dans l’eau (mare, mer, océan…) et qui parlent de peurs, de découverte, de connaissances nouvelles… Voici donc quelques mots sur Pas de panique, petit crabe, Scritch scratch dip clapote ! et Le dégât des eaux.
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Pas de panique, petit crabe, de Chris Haughton
(Thierry Magnier, 2019)
Du même auteur, je connaissais Chut, on a un plan et Oh non, George !, mais celui-ci est moins humoristique, même si l’on retrouve les répétitions faisant avancer l’histoire. C’est l’histoire d’un voyage initiatique dans lequel Petit Crabe et Très Grand Crabe quittent leur trou d’eau pour découvrir l’océan : guère rassuré, Petit Crabe doit se dépasser et aller plus loin que là où il se croyait capable d’aller. La vie est remplie d’épreuves, de nouveautés, et s’il faut savoir prendre son temps et y aller progressivement, il faut également oser.
Le monde extérieur et connu est globalement sombre, avec des teintes bleutées, mais les profondeurs se révèlent colorées et lumineuses, pleines de vie. Une magnifique récompense pour saluer le courage d’un petit crabe qui a vaincu sa peur de l’inconnu.
Un album tendre et motivant qui raconte aux petits comment on peut vaincre sa peur et marcher main dans la main, pince dans la pince, avec une personne de confiance pour explorer ses possibilités, ses capacités.
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Scritch scratch dip clapote !, de Kitty Crowther
(L’École des Loisirs, coll. Pastel, 2002)
Un album bien plus vieux qui a déjà vingt ans ! Une histoire sur la peur du noir quand la nuit s’en vient et que papa et maman se retirent dans leur propre chambre. Toutes les histoires, tous les câlins et tous les bisous du monde n’empêchent pas ce terrifiant moment d’advenir : celui où la nuit s’installe et où des bruits effrayants se font entendre. Essayer de s’endormir, réveiller les parents, se glisser entre eux… mais, pour apprivoiser sa peur, quelle meilleure solution que de la comprendre ? Il faut alors sortir dans la nuit et découvrir qui fait « scritch scratch dip clapote »…
Avec ces grenouilles anthropomorphes, l’album évoquera tout d’abord des scènes quotidiennes : les rituels préalables au coucher, les tentatives pour repousser le moment fatidique, les allers-retours entre les chambres enfantine et parentale, les peurs nocturnes amplifiées par une imagination galopante… Par la suite, même si le père de Jérôme tente d’abord de l’obliger à rester dans son lit, il change d’avis quand il entend à son tour le bruit étrange. J’ai beaucoup aimé alors ce moment d’écoute paternelle, de compréhension et de partage père-fils qui tous deux vont acquérir la connaissance rassurante de la source du bruit.
En revanche, les dessins ne me plaisent pas vraiment. Réalisés aux pastels gras (ou aux crayons de couleur ?), elles sont très simples, d’un style graphique qui ne me touche pas du tout. De plus, la mise en page ne les met pas en valeur, ce qui est un peu dommage.
Si je regrette vivement de ne pas adhérer aux illustrations, Scritch scratch dip clapote ! reste un très chouette album sur les terreurs nocturnes et les endormissements laborieux, auquel s’ajoute le plaisir des onomatopées !
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Le dégât des eaux,
de Pauline Delabroy-Allard (textes) et Camille Jourdy (illustrations)
(Thierry Magnier, 2020)
Une flaque d’eau près de la machine à laver et Nino part dans un grand rêve marin à base de plongée dans la lagune vénitienne et de régate sur ses canaux. Se dévoile alors un carnaval impossible et loufoque où se côtoient humains, animaux anthropomorphes, sirènes et moult créatures. Nino y fait des rencontres, partage la joie simple d’une journée exceptionnelle… sans savoir que cela fait écho à ce qui l’attend au réveil.
Car voici un album qui réserve une surprise à la fin… En effet, derrière une histoire poétique voguant sur les flots, se cache un sujet bien plus ordinaire. Je ne dévoilerai rien à ce sujet, vous laissant le plaisir de la découverte, mais j’ai trouvé qu’il s’agit d’une manière bien originale d’aborder un sujet pourtant vu et revu.
Je dois avouer que je n’ai pas complètement accroché à cet album. J’ai trouvé la partie onirique quelque peu survolée, avec des sauts dans le temps (cohérents cependant avec le déroulé parfois anarchique des songes) et personnellement cette prolifération dense d’êtres en tous genres m’a semblé quelque peu cauchemardesque bien loin de l’idée de liesse qu’elle était censée évoquer… Toutefois, cet ouvrage est plaisant par la richesse des illustrations toutes douces de Camille Jourdy, remplies de détails à observer, en plus d’être bien construit et atypique. Cela reste donc une lecture très intéressante.
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Sur ce, joyeux Noël à tous et à toutes !